Le devoir de protéger l'environnement
À côté du droit de vivre dans un environnement sain, le devoir de protéger l’environnement constitue le second pilier de notre vision. Ces deux premiers articles donnent immédiatement le ton et la dynamique que le texte cherche à établir. La protection de l’environnement est un droit, mais elle implique aussi des devoirs, qui doivent être assumés tant individuellement que collectivement, et cela à tous les niveaux.
Les lacunes du droit international apparaissent également quant à l’obligation générale de protéger l’environnement. Celle-ci est affirmée dans certains textes existants, mais de façon partielle ou incidente. On la retrouve d’abord dans des textes sans portée juridique. Ainsi, la Déclaration de Stockholm fait de nombreuses références au concept de devoir de protection. Son principe 2 prévoit que les ressources naturelles « doivent être préservés dans l'intérêt des générations présentes et à venir par une planification ou une gestion attentive selon que de besoin ». Son principe 3 énonce que « [l]a capacité du globe de produire des ressources renouvelables essentielles doit être préservée et, partout où cela est possible, rétablie ou améliorée ». Son principe 4 reconnaît ensuite la responsabilité de l’homme dans la sauvegarde et la gestion du patrimoine naturel, et exige la prise en considération de la conservation de la nature dans la planification pour le développement économique. Son principe 7, enfin, impose aux États de prendre « toutes les mesures possibles pour empêcher la pollution des mers ». Au sein de la Déclaration de Rio, cette exigence est posée dans le cadre des relations entre les États, avec une dimension transfrontière. Ainsi, en vertu du principe 2, les États ont le devoir de faire en sorte que les activités sur leur territoire ou au sein de leurs zones de contrôle respectent l’environnement des autres États. Dans son principe 7 ensuite, la Déclaration prévoit que les États doivent coopérer en vue « de conserver, de protéger et de rétablir la santé et l’intégrité de l’écosystème terrestre ».
Certaines conventions sectorielles ont formulé un devoir de protection de l’environnement à la charge des États parties, mais en se limitant à certains domaines précis. La Convention sur la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance par exemple, impose en son article 2 une obligation pour les Parties contractantes de « limiter et, autant que possible, de réduire graduellement et de prévenir la pollution atmosphérique, y compris la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance ». La Convention de Montego Bay sur le droit de la mer pose quant à elle une obligation générale de « protéger et préserver le milieu marin » (article 192). Enfin, la Convention de Rio sur la diversité biologique affirme dès son préambule que « les États sont responsables de la conservation de leur diversité biologique et de l'utilisation durable de leurs ressources biologiques ».
La jurisprudence, pour sa part, ne consacre pas un devoir général de protéger l’environnement mais seulement une obligation coutumière de prévenir les dommages transfrontières. C’est donc seulement de façon indirecte que cette obligation de prévention pourrait être interprétée comme comportant, de façon implicite, la nécessité de protéger l’environnement – lorsque ce dernier relève du territoire des autres États. La Cour internationale de Justice a ainsi considéré, à l’occasion de l’Avis consultatif sur la licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires de 1996, que « [l]’obligation générale qu’ont les États de veiller à ce que les activités exercées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle respectent l’environnement dans d’autres États ou dans des zones ne relevant d’aucune juridiction nationale fait maintenant partie du corps de règles du droit international ».
Les initiatives émanant de la société civile ont pris acte de ce devoir général de prendre soin de l’environnement et l’ont intégré à la plupart des instruments élaborés. La Déclaration de New Delhi sur les principes de droit international relatifs au développement durable, le projet de Pacte international sur l’environnement et le développement de l’UICN, les Principes d’Oslo sur les obligations globales pour le changement climatique, le projet de Pacte international relatif au droit des êtres humains à l’environnement élaboré par le Centre international de droit comparé de l’environnement comme la Déclaration mondiale sur l’État de droit environnemental de l’UICN formulent tous, bien qu’en des termes variables, une obligation de protection de l’environnement.